« Le jour de notre mariage, m’écrit une femme, le prêtre nous a dit que nous aurions des ‘petites morts’ à consentir… que notre sacrement de mariage nous faisait vivre ce que le Christ a vécu : une mort et une résurrection. J’avoue n’avoir rien compris à cette réflexion qui m’a plutôt ‘refroidie’ ».
Je veux bien croire, chère Madame, que vous ne vous attendiez pas à de tels propos, surtout à cet instant. Votre réflexion me fait penser à un prêtre à qui une personne demandait : « Où commence le chemin de croix dans votre église ? ». Il lui répondit, non sans humour : « Le jour du mariage ».
L’être humain ne va souvent au vrai bonheur, au bonheur durable, qu’en passant par des renoncements, des difficultés, des dépassements parfois douloureux. C’est vrai pour l’apprenti qui doit s’accrocher pour supporter les exigences d’une formation parfois éprouvante. Je ne connais guère de saints dont le rayonnement n’ait été précédé d’une vie de sacrifices ou de croix très lourdes : pensons à Thérèse de Lisieux.
Nous rejoignons alors les paroles bien connues de l’Evangile : « Il faut que le grain de blé puisse mourir pour que se lève un épi d’or’ ; « Il fallait que le Christ souffrit sa passion poru entrer dans la gloire ».
La vie de couple n’échappe pas à cet impératif de la vie terrestre. Oui, le couple peut parvenir à des joies certaines, mais il lui faudra accepter ces ‘petites mors’ dont vous a parlé ce prêtre : renoncer à la douce fusion, accepter que l’autre soit autre, dépasser la différence, supporter les limites, les imperfections du conjoint vivre dans la sérénité la longue adaptation si nécessaire pour construire une réelle communauté d’amour, réaliser dans la patience les inévitables compromis, renoncer à l’enfant idéal, porter la croix de la maladie du conjoint ou d’un enfant, rencontrer des difficultés financières, connaître des passages à vide sur le plan intime, vivre de longues séparations…
Le passage obligé du Vendredi Saint
Ce sont tous ces nécessaires renoncements enfin dépassés avec la grâce du Seigneur qui permettent d’accéder à une entente pacifiée, à une harmonie partagée, voie à un réel bonheur et, disons-le, à une renaissance, à une résurrection. L’être humain est fait pour le bonheur, mais les véritables joies ne s’obtiennent pas en claquant des doigts, car elles ne fleurissent qu’en altitude.
Le déroulement de toute vie, et notamment de la vie de couple, est un parcours pascal… et le chrétien ne saurait en être étonné : depuis le baptême où il a été plongé dans la mort pour que jaillisse en lui la vie divine, il sait qu’on ne connait les joies de Pâques qu’en acceptant le passage obligé du Vendredi Saint.