« J’ai lu vos livres sur le couple, c’est très beau tout ça : vous dites aux hommes de communiquer davantage avec leur femme. J’aimerais bien, mais je ne sais pas comment faire, je ne sais pas quoi dire… »
Cet homme soulève l’un des problèmes le plus souvent posés par les couples : le mutisme masculin. Certes, il ne faut pas généraliser : il y a des couples où c’est la femme qui s’enferme dans un silence prolongé, interprété alors par le mari comme une bouderie. Mais plus nombreux sont les couples où la femme se plaint du silence de son mari.
C’est pourtant si important la communication ! C’est même une question de vie ou de mort pour le couple. Quand on ne se parle plus, on finit par n’avoir plus rien à se dire. On est tenté alors de chercher hors du couple ce besoin de communiquer. Face à son mari qui ne dit rien, la femme ne peut se situer, elle ne peut que faire des suppositions : « Quand je le vois pensif, ennuyé, comme il ne dit rien, je me demande ce qu’il a : va-t-il être au chômage ? Me tromperait-il ? Ou a-t-il simplement mal au foie ? »
Heureuse épouse à qui un mari dit en rentrant : « Je me suis disputé avec un collège, je suis furieux… Les enfants et toi n’avez pas intérêt à me déranger ! » Elle sait à quoi s’en tenir ! Ce même mari qui lui dira un autre jour avec la même sincérité : « Si tu savais comme il me tardait d’être rentré pour te retrouver, pour t’aimer ». Elle saura à quoi s’en tenir là aussi !
Mais surtout, la communication permet de garder l’admiration pour conserver l’amour. L’être humain est un infini dont on n’a jamais fait le tour. S’il n’y a pas de dialogue, on ne voit plus le merveilleux de l’autre.
L’auteur de la question a bien conscience de cette importance de la communication, puisqu’il écrit : « J’aimerais bien communiquer ». Beaucoup de maris n’en sont pas là. Combien disent volontiers à leur femme : « Que veux-tu que je te dise ? Que je t’aime ? Mais tu le vois bien… Regarde ce que je fais pour toi, pour nous, pour les enfants ».
Exprimer son ressenti
Souvent, du moment qu’il agit, un homme croit qu’il dit. Or, pour la femme, en général, les paroles comptent autant si ce n’est plus que les actions.
La difficulté se situe davantage au niveau du comment : « Je ne sais pas comment faire, je ne sais pas quoi dire ». Les maris désireux de plaire à leur épouse s’ingénient parfois à chercher ce qu’ils pourraient bien lui dire. Les uns discutent de problèmes politiques, économiques, ou sportifs – en général, ce n’est pas ça que l’épouse attend, car ce faisant, les maris ne parlent pas d’eux ! D’autres racontent tout ce qu’ils ont fait dans la journée – là encore, ce qui intéresse l’épouse, ce n’est pas tant ce qu’ils font que ce qu’ils ressentent.
Ce qu’une femme veut connaître de son mari, c’est d’abord et essentiellement son ressenti, ce qu’il vit dans sa sensibilité profonde.
Encore faut-il pour cela que le mari ait conscience de ce qui se vit en lui, qu’il puisse mettre un nom sur ses émotions, sur les sentiments qui l’habitent, et qu’ensuite, il ait la simplicité de les exprimer.
La communication avec les autres commence par la communication avec soi-même. Alors, posez-vous sincèrement les questions : est-ce que je me donne le droit d’avoir des sentiments ? Est-ce que je suis capable de mettre un mot sur chacune de ces émotions qui naissent en moi ? Est-ce que j’ose dire mon ressenti sans fausse pudeur ? Est-ce que j’accepte de parler de moi, de dire : « Je » ? Est-ce que j’ose demander ? Dire mes désirs ?
Quand un mari se permet d’accueillir et d’analyser ses sentiments sans penser que c’est du sentimentalisme mièvre ou du temps perdu, il trouve alors les paroles toutes simples de la vraie communication : « Je suis heureux près de toi », « Sais-tu que tu me manques quand tu n’es pas là », « Ma joie, ce sont nos enfants », « Je suis fatigué, ne m’en veux pas »…
Heureux couples qui ont compris qu’on pouvait tout se dire, même le négatif, parce qu’on ne le dit jamais comme un reproche à l’autre, mais comme l’expression de ce qu’on ressent.
A l’écoute de son cœur
Pour trouver les phrases heureuses, il suffit d’être à l’écoute de son cœur et, sans fausse pudeur, de les laisser jaillir. A l’écoute aussi de l’attente de l’autre. Alors, viennent tout naturellement d’abord des paroles d’amour. Dieu sait si la demande d’une parole d’amour est forte chez la femme ! A côté des « je t’aime », mots inusables, l’imagination peut trouver mille paroles originales ou imprévues : « J’aime quand tu as le cœur au bord des lèvres », « Je t’aime aujourd’hui pour ce que tu es aujourd’hui »…
Peuvent monter également des paroles d’admiration et de reconnaissance : « Que tu es belle ! », « Ma femme, cadeau de Dieu ». Mais aussi des paroles qui disent la peine et la déception : « Je n’en peux plus », « J’ai peur de te décevoir », « Longtemps, je t’ai caché ma peine. Maintenant je te la confie… on sera deux pour la porter »…
Et quand vous serez vraiment à court d’idées, pourquoi ne pas dire tout simplement : « Excuse-moi, mais je ne trouve pas les mots pour te dire tout cde que j’aimerais te dire ». Votre femme devinera ce que vous ne dites pas… et davantage encore !
Il reste que le plus grand cadeau qu’on puisse faire à son conjoint, c’est une parole qui livre le meilleur de soi : cette intériorité où se trouvent nos valeurs, nos raisons de vivre, et notre relation avec Dieu, l’action de l’Esprit en notre cœur. A l’image de Dieu, qui est relation (un foyer d’échange entre les Personnes de la Trinité), l’être humain ne s’épanouit que dans une vie de partage et de dialogue. A quoi bon s’aimer tant et se le dire si peu ou si mal ?