« Mon mari ne me rend pas heureuse », me disait récemment Éléonore, mariée depuis douze ans à Paul. Elle me décrit alors sa déception face à la non-réalisation de tous ses désirs développés depuis sa tendre enfance. Elle qui aspirait à une vie facile et confortable a dû assurer un travail qui ne l’intéresse pas, assumer un quotidien familial parfois difficile, affronter des relations humaines souvent décevantes. « Et surtout, conclut-elle, un mari qui ne comprend pas mes difficultés et qui ne fait rien pour me faciliter le vie ». Elle envisage même la séparation.
Accepter la vie réelle, mais sans la subir
La mise en place d’une vie conjugale peut relever pour certains d’un pénible apprentissage, duquel on ne ressort pas toujours vainqueur. En effet, la vie de couple et de famille nécessite une bonne dose de patience, d’ouverture à la réalité d’autrui, d’oubli de soir. D’humilité donc. Et chacun sait combien ces vertus relèvent parfois du combat !
Les maitres spirituels de notre tradition chrétienne, des Pères du désert à Elisabeth de la Trinité en passant par Cassien, Thérèse d’Avila, François de Sales et tous les autres, attestent que le chemin vers le don véritable est rocailleux, rempli d’embûches et de chausse-trapes. L’itinéraire est initiatique, et les découvertes, tel un jeu de piste, nous ouvrent chacune l’accès à la suivante. Le voyage est enthousiasmant pour celui qui veut aller explorer le fin fond de son âme. Décapant aussi.
« Croyez-vous que je puisse trouver le bonheur avec mon mari ? » murmure Eléonore avec douleur. Eh oui ! Les rêves tels qu’exprimés vont devoir être relégués dans la malle aux souvenirs. Pour qu’Eléonore et Paul vivent dynamiquement leur mariage, l’adaptation au réel va être le maître mot de leur vie quotidienne. Arrêter d’imaginer ma vie pour être en prise directe avec que j’ai à vivre ici et maintenant.
Qu’est-ce que je vois ? Qu’est-ce que j’entends ? Quelle est cette réalité qui se présente à moi ? Le lever matinal, le travail pas très drôle, les indispositions des uns et des autres, la turbulence des enfants… C’est cela que j’ai à vivre. La vie, la vraie, c’est accepter le réel, l’état présent. Non pas de façon subie et désabusée, mais de façon consciente et dynamique en optimisant autant que possible ce qui m’est donné à vivre. Tout en tenant compte de mes limites, bien sûr. Et sans attendre que les autres (mon mari, ma femme, mes enfants, mes collègues…) réalisent à ma place ce qui m’incombe.