Tout commence avec ce que j’appelle le « frisson ». Au cours de notre vie, il est bien normal que nous rencontrions quelqu’un qui capte notre attention. Il y a quelque chose dans son apparence, sa façon de parler ou d’agir, qui nous fait frémir intérieurement. C’est cette sensation qui nous pousse à inviter cette personne, au restaurant par exemple. Parfois, elle disparaît dès le premier rendez-vous, parce que quelque chose en ce garçon ou en cette fille nous semble insupportable. En revanche, avec une autre personne, le « frisson » s’intensifie à chaque rencontre.
Et l’obsession amoureuse commence à s’installer. Nous sommes absolument certains qu’il s’agit de la personne la plus merveilleuse que nous ayons jamais vue. Tout le monde est capable de voir ses défauts mais pas nous. Si nos parents nous disent : « As-tu réfléchi au fait qu’il n’ait occupé aucun emploi stable en cinq ans ? », nous répondons : « laissez-lui une chance. Il attend le bon poste. ». Si nos amis nous demandent : « cela ne t’ennuie pas qu’elle se soit déjà mariée cinq fois ? », nous rétorquons : « Elle n’a épousé que des minables. Cette femme mérite d’être heureuse. Et je vais la rendre heureuse ! ».
Cette étape de la relation amoureuse peut se définir comme la phase « obsessionnelle ». Nous n’arrivons pas à chasser l’être aimé de notre esprit. Nous allons nous coucher en pensant à cette personne et nous nous réveillons avec son nom sur les lèvres. Du matin au soir nous nous demandons ce qu’elle est en train de faire. Un coup de fil de sa part est le moment phare de notre journée et nous voulons passer le maximum de temps avec elle. Cette obsession amoureuse entraîne des pensées irrationnelles, telles que : Je ne pourrai être heureuse que si nous restons ensemble tout le temps. Rien d’autre n’aura vraiment d’importance. A ce stade de l’amour, les différences sont minimisées ou gommées. Nous n’avons qu’une seule idée en tête : nous sommes heureux, nous n’avons jamais été aussi heureux et nous comptons bien le rester jusqu’à la fin de nos jours.
Cette étape euphorique n’exige guère d’efforts. Nous sommes entraînés par le courant d’une rivière d’émotions agréables. Nous sommes prêts à faire presque n’importe quoi pour le bien de l’autre. C’est dans cette phase de l’amour que la plupart des gens se marient. Ils s’attendent à éprouver indéfiniment l’un pour l’autre ces mêmes sentiments euphoriques. Ils ne comprennent pas que le sentiment amoureux, en fait, n’est que la première étape de la relation.
Des études montrent que la durée moyenne de cette euphorie initiale est de deux ans. Lorsque nous redescendons de ces hauteurs, il nous faut faire la transition vers une nouvelle étape de l’amour : c’est le temps d’agir de façon plus délibérée et de faire un effort conscient pour répondre aux besoins émotionnels de l’autre. Pour de nombreux couples, cette transition est un échec. Les partenaires tombent de nouveau amoureux, mais de quelqu’un d’autre. Ils divorcent, se remarient, répétant ainsi le même cycle avec un autre conjoint : 60% des gens qui se remarient divorcent une seconde fois. Et si d’aventure ils font une nouvelle tentative, le taux de divorce du troisième mariage est de 75%.
L’importance d’apprendre à passer de la phase euphorique à la phase volontaire de l’amour devrait être évidente. La deuxième étape est vraiment différente de la première. Les sentiments obsédants que nous avions l’un pour l’autre commencent à s’atténuer et nous reconnaissons qu’il existe dans la vie d’autres centres d’intérêts que l’objet de notre amour. L’illusion de la perfection se dissipe et nous reviennent alors à l’esprit les paroles de nos parents et amis : « Il n’a pas eu le moindre emploi stable en cinq ans », « Elle a déjà été mariée cinq fois… »
Nous commençons à nous demander comment nous avons pu être aussi aveugles en face de la réalité. Nos différences de personnalité, de centres d’intérêts et de style de vie nous sautent aux yeux alors qu’auparavant, nous les discernions à peine. L’euphorie du début s’est estompée ; nous commençons à nous concentrer sur nous-mêmes et à nous apercevoir que notre conjoint n’est pas la réponse à tous nos besoins. Nous nous mettons à demander, puis à exiger, qu’il agisse de telle ou telle façon et, s’il n’est pas disposé à nous satisfaire, nous nous replions sur nous-même ou nous donnons libre cours à notre colère. Cette colère ou ce désir d’abandonner la partie nous éloignent encore davantage de notre partenaire. Il lui devient alors plus difficile de nous exprimer son amour.
Une relation aussi anémiée peut-elle retrouver une vitalité ? La réponse est oui, à condition que le couple parvienne à comprendre la nature réelle de l’amour. Chacun doit aussi découvrir comment exprimer ses sentiments dans un langage que l’autre peut capter. Les bonnes intentions ne suffisent pas. Nous devons également apprendre de quelle manière répondre au besoin d’amour de notre conjoint. Les gens sont tous différents. Ce qui donne à une personne l’impression d’être aimée ne produira pas forcément le même effet sur une autre. Par nature, nous avons tendance à exprimer nos sentiments dans la langue qui nous donne, à nous, le sentiment d’être aimé.
Quand notre conjoint ne réagit pas favorablement à l’expression de notre affection, nous nous sentons frustrés. Or, ce n’est pas la sincérité de notre amour qui est en cause, mais le fait que nous ne parlions pas le bon langage. Si nous employons notre propre langue au lien de celle de notre partenaire, la communication ne passe pas.
Pour avoir un résumé des langages de l’amour décrit par Gary Chapman dans son livre Les langages de l'amour, de Gary Chapman, aux éditions , lisez l’article : L’amour en action